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S. Gauzy : "Jouer la Coupe du Monde 3 fois d'affilée est une fierté"

Publié le : 19/10/2017
Modifié le : 19/10/2017

Alors qu’il s’apprête à fêter ses 23 ans, Simon Gauzy dispute en cette fin de semaine la Coupe du Monde 2017 à Liège, sa troisième participation consécutive à cette prestigieuse compétition qui réunit 20 des meilleurs pongistes du monde. Le n°1 français évoque son début de saison et ses ambitions.
Le site de la Coupe du Monde 2017

Avec votre club allemand d’Ochsenhausen, vous avez joué et gagné jeudi dernier à La Romagne en Ligue des champions, comment s’est passé ce match ?

Nous ne nous attendions pas à un score de 3-0, dans la mesure où c’était un petit miracle de mener 2-0 après les deux premiers matchs : Hugo Calderano sauve trois ou quatre balles de match contre leur n°1 adverse, Shihao Wei, et moi une balle de match face à Chen Tian Yuan, ça aurait très bien pu tourner à 2-0 pour eux. Après, on se rend forcément la rencontre plus simple et à l’arrivée, nous étions tous très satisfaits, parce que je pense que La Romagne est actuellement la meilleure équipe française, c’était un très bon résultat pour nous.

C’était aussi l’occasion de rejouer en France, appréciez-vous à chaque fois ces retours au pays ?

Oui, chaque fois que je reviens jouer en France, que ce soit en Ligue des champions ou au Top 16 européen, c’est spécial, et de toute façon, j’adore revenir dans mon pays, quelles que soient les circonstances. Là, forcément, quand je suis en Ligue des champions avec mon club contre un club français, les supporters ne sont pas avec moi, mais ça reste très agréable. Je pense que les gens sont très contents de me voir jouer, parce que c’est assez rare par rapport aux autres joueurs français, et à la fin du match, il y a eu beaucoup de demandes d’autographes et de photos, c’est toujours sympa pour moi. Et ça me réussit plutôt bien de jouer en France avec mon club : l’année dernière, j’avais gagné mon match à Angers, cette année, j’ai gagné, et à chaque fois, on s’est imposés 3-0 !

Vous avez enchaîné le week-end dernier en remportant contre Brême votre premier match de la saison en Bundesliga après trois défaites initiales, y avait-il un peu de doute au sein de l’équipe ?

De gros doutes, même ! A notre décharge, nous avions joué deux équipes très fortes, Fulda et Düsseldorf, nous avons eu des circonstances en notre défaveur : un virus qui nous a un peu saccagés pour notre premier match, ensuite Yuto Muramatsu a eu un problème de plaques qu’il a voulu changer au dernier moment, ça ne s’est pas avéré super concluant, et moi, j’ai eu des problèmes personnels qui m’ont un peu miné pendant un gros mois… Du coup, avec ces trois défaites d’affilée, il commençait à y avoir un peu le feu au lac, d’autant que le niveau est très relevé en Bundesliga. Autant il y a encore deux-trois ans, on pouvait se dire que si on commençait mal, on pouvait revenir, mais aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Par exemple, Brême, qui était assez faible l’année dernière, est aujourd’hui sans doute une des quatre meilleures équipes de la Bundesliga, le match contre eux a été dur et on savait que si on ne les battait pas, ça risquait d’être compliqué avec un nouveau gros match contre Sarrebruck derrière. Maintenant, on est toujours dans le doute, on n’a qu’une victoire pour l’instant, ça va être long et dur de revenir.

Quels sont les objectifs d’Ochsenhausen cette saison en Championnat et en Ligue des champions ?

En Championnat, on veut vraiment se qualifier pour les play-offs et si possible faire mieux que la saison dernière où on avait perdu en demi-finale face à Fulda, c’est un objectif assez clair entre nous. Le plus important est d’abord d’être dans les quatre, après, comme les meilleures équipes se tiennent en pas grand-chose, pourquoi ne pas aller chercher la finale, voire le titre ? Mais pour l’instant, on n’est pas en super bonne position. Quant à la Ligue des champions, la saison dernière, nous avions perdu en quarts de finale au terme d’un match très serré contre Düsseldorf, là, grâce à nos classements mondiaux respectifs, nous sommes têtes de série n°3, ce qui nous évite de jouer Orenburg, Düsseldorf et Ekaterinbourg avant les demi-finales, donc on aimerait bien aller en demi-finales, et pourquoi pas atteindre la finale si on ne joue pas Orenburg, qui est un peu l’épouvantail de la Ligue des champions. 

Une victoire en Bundesliga, une victoire en Ligue des champions, mais aussi une 3e place fin septembre sur le World Tour Platinium d’Autriche, des résultats idéaux avant d’attaquer la Coupe du Monde cette semaine ?

Oui, je suis surtout content d’être débarrassé de mes problèmes personnels, je rejoue bien, je m’entraîne bien, j’ai gagné des bons matchs dernièrement, je me sens bien et j’ai hâte d’y être.

Quelle importance revêt cette Coupe du Monde pour vous ?

Jouer la Coupe du Monde trois fois d’affilée, c’est une fierté, un honneur. C’est une compétition vraiment à part dans le sens où il y a un nombre de joueurs très restreint, avec les meilleurs de chaque continent, il n’y a que deux tables dans la salle, les tribunes sont pleines… C’est pour moi une des plus belles compétitions, il y a bien sûr les Jeux Olympiques et les Championnats du monde, mais les Championnats du monde par exemple, il y a 300 joueurs, c’est différent. Là, on sent qu’on est dans le gratin, c’est vraiment une compétition qui me tient à cœur et j’aimerais vraiment y performer.

Sportivement, que gardez-vous de vos deux précédentes participations ?

La première année, je ne m’étais pas facilité la tâche en perdant face à Gionis en poule, si bien qu’après, j’étais tombé contre Fan Zhendong en 8e de finale. L’année dernière, j’ai eu la chance d’être tête de série, j’ai fait un super premier match face à Steger devant le public allemand acquis à sa cause, 12-10 à la belle en sauvant quatre balles de match, c’était un bon moment. Ensuite, je passe très près de la demi-finale puisque je m’incline 12-10 à la belle face à Karlsson, mais j’en garde un très bon souvenir, j’avais été surpris de mon niveau de jeu, puisque j’avais très peu d’entraînements dans les jambes, j’avais été malade tout le mois d’août.

Cette année, vous êtes tête de série n°7, quels objectifs vous fixez-vous ? Faire mieux qu’en 2016 ?

Déjà faire aussi bien et respecter mon rang. Je vais commencer en 8e de finale contre un premier de poule qui aura déjà deux matchs dans les jambes, il n’y aura pas une grande différence de niveau entre lui et moi. Donc si je peux rallier les quarts de finale comme l’année dernière, ça serait déjà une performance, pour après aller jouer un gros match face à un ténor, comme Ma Long, Ovtcharov, Boll ou Mizutani, ça serait vraiment sympa, ça ne serait que du bonus.

Sur la forme du moment, qui vous semble le plus dangereux ?

Les deux Chinois, Ma Long évidemment, n°1 mondial depuis deux-trois ans sans discontinuer et que nous n’avons pas vu en compétition depuis quelque temps, c’est vraiment le meilleur joueur du monde actuel, et Lin Gaoyuan, qui vient de gagner la Coupe d’Asie et l’Open d’Autriche, il est passé de la 30e place mondiale à la 9e en un mois. Ce sont les deux favoris, après il y a toujours le trio Ovtcharov-Boll-Mizutani.

Vous êtes 13e joueur mondial, votre meilleur classement mondial, peut-on dire que vous ne vous êtes jamais senti aussi fort ?

Oui, je ne me suis jamais senti aussi fort, dans le sens où je suis plus confiant, j’ai moins peur d’affronter des joueurs moins bien classés que moi et je progresse au niveau mental. Et ce qui est positif, c’est que je pense que j’ai encore une bonne marge de progression dans beaucoup de domaines, c’est d’ailleurs ce qui me motive, je suis un insatisfait.

Dans quels domaines en particulier ?

Dans le domaine mental. Je dois prendre conscience que les joueurs en face de moi savent maintenant qui je suis : je ne suis plus le petit jeune qui monte, le petit garçon qui crée la surprise à chaque compétition. Maintenant, on m’attend, je suis confirmé, à moi de m’adapter et à continuer à travailler.

Vous êtes-vous fixé un objectif de classement cette saison ?

Non, je ne m’en fixe pas, parce que je ne suis pas le seul à vouloir progresser et à m’entraîner beaucoup, il y en a douze devant moi et une trentaine derrière qui veulent me passer devant. Ça fait un an et demi que je suis dans le Top 20 mondial, ça prouve que j’ai passé un cap au niveau de la régularité. L’année dernière à la même époque, j’étais 14e, aujourd’hui, je suis 13e, il n’y a qu’une place de différence, mais moi, je me trouve bien meilleur aujourd’hui. Mais je suis bien conscient que je peux très bien retomber, comme l’a fait Koki Niwa qui était passé de la 11e à la 27e place avant de remonter 8e, ce n’est jamais complètement linéaire. Si dans trois mois, je suis 10e place mondial, ça sera parfait, mais si je redescends 20e, ce ne sera pas une catastrophe. Pour l’instant, ça ne revêt pas une importance capitale, mais si j’arrive un jour à me stabiliser dans le Top 10 mondial, là, ça voudra dire quelque chose.

Quels rendez-vous avez-vous particulièrement cochés cette saison ?

Ce qu’on me reproche parfois, c’est que j’ai toujours envie de bien jouer tout le temps, quels que soient les matchs et les compétitions : si je participe à un match de Bundesliga, j’ai envie de le gagner, même chose si c’est le Critérium fédéral. Ça énerve parfois un peu mes coaches qui voudraient que je pense un peu plus à long terme, car si je perds le match de dimanche, ça va m’énerver alors que ce n’est pas une fin en soi. Je joue 80-90 matchs par an, si à chaque fois que j’en perds un, je me mets plus bas que terre, ça va être compliqué, ils essaient donc de me faire comprendre qu’on ne peut pas toujours gagner tout ce qu’on veut, à part si on s’appelle Ma Long. Après, forcément, les rendez-vous avec l’équipe de France me tiennent particulièrement à cœur, je pense cette saison aux Championnats du monde par équipes à Halmstad, on a une belle équipe de France avec Manu (Lebesson) et Tristan (Flore) s’il se remet de sa blessure.

Si on regarde à plus long terme, vous aurez 29 ans lors des Jeux Olympiques de Paris 2024, vous sentez-vous déjà concerné ?

Oui, très concerné. J’ai suivi ça de près parce que je suis assez proche de Jean-Philippe Gatien, ça fait forcément réfléchir différemment, j’essaie de caler mes ambitions à plus long terme, je me dis que j’ai trois olympiades devant moi avec la possibilité de faire quelque chose de beau, Tokyo, Paris et même Los Angeles où je n’aurai que 33 ans. J’essaie de me rassurer de temps en temps, en me disant que si, à un moment, ça va moins bien, j’ai encore le temps de faire de belles choses sur ces rendez-vous.

Un dernier mot sur votre quotidien en Allemagne : que faites-vous quand vous ne jouez pas au tennis de table ? Vous y plaisez-vous ?

Oui, je m’y plais, la preuve, j’ai resigné jusqu’en 2019, je ne me vois pas partir. La première saison a été compliquée avec beaucoup de changements aux niveaux de l’entraînement et de ma vie personnelle, mais aujourd’hui, j’ai trouvé en Allemagne ce qu’il me fallait : j’ai des coaches qui, de mon point de vue, sont les meilleurs, je m’entraîne avec de bons joueurs, j’ai un président qui nous fait confiance, je suis très heureux ici. Et quand je ne joue pas au tennis de table, ce qui n’arrive pas souvent, d’autant qu’en Bundesliga, on joue le dimanche, je passe du temps avec ma copine, avec des amis français ou d’autres nations avec qui j’ai créé des liens, j’essaie de profiter au maximum du peu de temps qu’il me reste.


Informations pratiques

Coupe du Monde messieurs 2017
20 au 22 octobre - Liège (Belgique)